Les bons auteurs français ont rendu leur langue universelle ; elle remplace le latin : c'est la langue des savants, des politiques, des courtisans, des femmes et en un mot elle est entendue partout.
Elle est devenue un passe-partout qui vous introduit dans toutes les maisons et dans toutes les villes. Voyagez de Lisbonne à Petersbourg et de Stockholm à Naples en parlant le français : vous vous faites entendre partout.
Par ce seul idiome vous vous épargnez quantité de langues qu'il vous faudrait savoir, qui surchargeraient votre mémoire de mots à la place desquels vous pouvez la remplir de choses, ce qui est bien préférable.
Quoique j'aie prévu les difficultés qu'il y a pour un Allemand d'écrire dans une langue étrangère, je me suis pourtant déterminé en faveur du français, à cause que c'est la plus polie et la plus répandue en Europe et qu'elle paraît en quelque sorte fixée par les bons auteurs du siècle de Louis XIV. Après tout, il n'est pas plus étrange qu'un Allemand écrive de nos jours en français qu'il ne l'était du temps de Cicéron qu'un Romain écrivît en Grec.
Frédéric II de Prusse, extraits de Histoire de mon temps ( 1746 ) et des Mémoires pour servir à l'histoire de la maison de Brandebourg ( 1751 ).
J'ai ouï dire que les princes protestants n'appréciaient pas trop l'internationalisme européen et la politique française de Frédéric II de Prusse...