Le Mini-SAR a cartographié des cratères d'impact météoritiques, dont certains (en rouge) recèlent de la glace.
Un radar américain embarqué sur une sonde indienne a détecté l'eau gelée au fond de cratères météoritiques. Considérée
depuis la fin des missions Apollo comme un astre sans grand intérêt, la
Lune n'en finit plus d'étonner les scientifiques. C'est que notre
satellite, que l'on croyait désespérément sec, contient en fait de
l'eau. Et même beaucoup d'eau. En septembre dernier, un spectromètre de
la Nasa installé sur la petite sonde indienne Chandrayaan-1
révélait la présence de molécules d'eau dans les premiers centimètres
du sol lunaire. Deux mois plus tard, en envoyant l'étage d'une fusée
s'écraser près du pôle sud de l'astre sélène, l'agence spatiale
américaine parvenait à détecter, grâce à sa sonde LCROSS, de la vapeur
d'eau dans le panache de poussières soulevé par l'impact. Mais
mardi, après avoir exploité les données du radar Mini-SAR, embarqué à
bord de Chandrayaan-1, les scientifiques de la Nasa ont annoncé avoir
découvert de la glace au fond d'une quarantaine de petits cratères
(diamètre compris entre 1,6 et 15 km) situés près du pôle nord lunaire.
«Bien que la quantité totale de glace dépende de son épaisseur dans
chaque cratère, on estime qu'il pourrait y avoir au moins 600 millions
de mètres cubes d'eau gelée», indique le communiqué. Le Mini-SAR
a réalisé en 2009 la cartographie de ces cratères d'impact
météoritiques, invisibles depuis la Terre car cachés en permanence par
l'obscurité, en ayant recours aux propriétés de polarisation des ondes
radar. «Après examen des données, notre équipe scientifique a
conclu à une forte indication en faveur d'eau gelée, une découverte qui
fournira aux futures missions un nouvel objectif à explorer plus avant
et à exploiter», a confié Jason Crusan, l'un des responsables des
opérations spatiales de la Nasa à Washington. La découverte du radar,
qui sera publiée dans le Geophysical Research Letters, corrobore
d'autres conclusions émises par les instruments de la Nasa et devrait
aider à mieux comprendre les multiples formes prises par l'eau sur la
Lune. Elle intervient également quelques semaines seulement après la
décision du président Barack Obama d'annuler le programme Constellation
qui prévoyait un retour des astronautes sur la Lune aux alentours de
2020. L'existence de ces énormes quantités de glace «montre que
la Lune est une destination encore plus intéressante et captivante, sur
les plans scientifique, exploratoire et opérationnel, que ce que les
gens pensaient auparavant» , s'est félicité de son côté Paul Spudis, le
chef de projet de l'expérience Mini-SAR au Lunar and Planetary Institute de Houston (Texas). Pour
Bernard Foing, ingénieur à l'Agence spatiale européenne et directeur
exécutif du Groupe international de l'exploration de la Lune, «il
faudra veiller à l'avenir, si des missions sont envoyées sur la Lune, à
bien préserver ces cratères pour procéder à des analyses ou à des
carottages. Les grains cométaires emprisonnés dans cette glace, et dont
la trace a disparu sur Terre, à cause des phénomènes d'érosion, peuvent
nous apprendre beaucoup de choses sur l'origine de notre système
solaire». Lancé en octobre 2008, le satellite Chandrayaan-1,
dont la mission s'est achevée en août dernier, emportait avec lui onze
instruments de mesure indiens, américains, européens et bulgare. Ce bel
exemple de coopération internationale aura permis de réaliser une
moisson de données exceptionnelle en un temps très court.