Qu'est-ce l'identité nationale ? Aucun homme politique français n'a été capable de répondre à cette simple question. Ni le ministre Eric Besson, ni le président Nicolas Sarkozy, ni la gauche qui souhaite la fin du débat, sans y avoir attribué de réponse non plus, ni la nouvelle égérie médiatique du concept, Marine Le Pen.
On a ainsi le sentiment que le concept serait une évidence, alors même que personne ne le conçoit de la même façon. Pour certains, l'identité française se limiterait à une forme de patriotisme constitutionnel ou relèverait d'une définition administrative, "est français celui qui a une carte nationale d'identité". Pour d'autres, l'identité française se confond avec la république et ses valeurs (actuelles). Enfin, pour certains encore, plus minoritaires, l'identité française aurait une composante ethnique.
Revenons aux deux termes de ce concept. Dans identité, on retrouve le latin idem qui signifie "même". Dans nationale, on retrouve le latin natio, relevant de la racine *gen- "naître", que l'on retrouve dans le grec genos, "lignée, race". Dans un article sur le concept de "nation", on a vu qu'elle définissait le regroupement de ceux de même naissance, de même ascendance. Si on devait traduire l'expression "identité nationale", le terme le plus juste serait "homogénéité", du grec homoios, "même", et de la racine *gen-. Mais "homogénéité" doit alors se comprendre au sens grec, le terme homogenês signifiant " de même souche" et étant l'exact antonyme d'allogenês, "allogène".
Ainsi le concept d'identité nationale est par définition une notion exclusive, limitée aux "de souche". Ceux qui sont horrifiés par cette idée doivent alors choisir un autre vocabulaire pour lancer le débat.
Allons plus loin et analysons s'il existe réellement une identité nationale "française". Remarquons déjà que la république française, à la différence des autres pays, se conçoit comme une entité refusant de se fonder sur le strict principe d'ascendance mais développant l'idée d'un "vouloir vivre ensemble", ce qui fait au final de la France une non-nation. Il faudrait alors parler d'une non-identité non-nationale.
L'identité régionale, par exemple celle de la Bretagne ou celle de la Corse, existe. Il y a un héritage commun tangible. L'identité européenne existe aussi et pour les mêmes raisons, parce que ce qui unit un breton et un corse au niveau identitaire, donc dans un sens non-administratif, ne saurait être la France mais l'Europe. En soi, il y a autant de différences, ou aussi peu, entre un breton et un corse qu'entre un irlandais et un italien, et aussi peu entre un basque et un alsacien qu'entre un géorgien et un danois.
Ainsi le ciment entre ces peuples ce n'est pas l'identité "nationale" française, mais leur commune européanité.
L'identité nationale n'existe pas en France. Ceux qui veulent en parler ne peuvent être amenés qu'à défendre en réalité un "patriotisme" constitutionnel, une "identité" de papier. Le paradoxe est que malgré tout cette dernière est fondée inconsciemment sur des valeurs européennes, celles qui ont donné naissance aux institutions républicaines, et qu'à ce titre elle est critiquée vigoureusement par les idéologues mondialistes.
Quelle que soit la façon dont on aborde le sujet, réelle ou même artificielle, notre identité est toujours européenne.
Thomas FERRIER