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| Benoît XVI, les Loups Gris et l'islam | |
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Ferrier Administrateur
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| Sujet: Benoît XVI, les Loups Gris et l'islam Ven 10 Nov - 20:14 | |
| - Citation :
- Benoît XVI, l’Occident chrétien et la violence
Réflexions sur la signification d’un cours mal compris du Professeur Ratzinger
Dimitri Kitsikis
Le prochain voyage du pape Benoît XVI en Turquie, en novembre prochain, s’annonce difficile, étant donné les menaces proférées à son encontre par les fondamentalistes musulmans, outrés par son discours du 12 septembre dernier et que sa rencontre, du lundi 25 septembre, avec les ambassadeurs de 20 pays musulmans n’a pas suffi à calmer. Les foules musulmanes ressentiront longtemps encore la prétendue offense.
Le danger provient sans doute de Turquie et plus précisément du groupe nationaliste turc païen des «Loups gris» (Bozkurt), qui est l’équivalent des groupes païens européens qui essayent de faire revivre les traditions préchrétiennes d’Europe (comme les religions grecque, celte et autres). Cette organisation d’extrême droite a pour symbole un loup gris hurlant à la lune, et nourrit, depuis longtemps, une antipathie prononcée pour le Vatican et particulièrement à l’encontre de Benoît XVI qui s’est prononcé clairement contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. C’est un membre de cette organisation, Mehmet Ali Agca, qui avait tiré sur le pape Jean-Paul II à Rome, en 1981. Les menaces contre le présent pape continuent à venir des Loups gris. Un incident troublant a eu lieu au début d’octobre de cette année, dont l’importance a été sous-estiméée de façon scandaleuse par la presse occidentale : un jeune Turc Hakan Ekinci avait détourné un avion des Turkish Airlines, en route de Tirana vers Istanbul (qui avait finalement atterri en Italie, à Brindisi), sans qu’il soit armé, avec une facilité troublante. Le bruit courut que ce pirate de l’air était un membre des Loups gris, bien que, lui, affirmait qu’il s’était converti au christianisme, qu’il voulait remettre un message à Rome, personnellement à Benoît XVI, parce qu’il était d’accord avec le message non violent du pape et qu’il refusait à cause de cela de faire son service militaire en Turquie ! On ne pouvait écarter l’hypothèse, qu’en fait, il voulait préparer un mauvais coup contre le pape. Ce qui m’a personnellement impressionné c’est que, en plus du journal Le Devoir (de Montréal), j’ai essayé, sans succès, d’alerter plusieurs journaux de la presse occidentale. J’ai même, en tant qu’ancien conseiller et ami intime du président défunt de la République turque, Turgut Ozal, essayé d’alerter les services du gouvernement turc. Ce qui m’a frappé, dans toutes ces démarches, c’est le peu d’empressement de faire connaître pareille inquiétude. Je ne doute pas que les autorités turques prendront toutes les mesures de sécurité nécessaires lors de l’arrivée du pape en Turquie, le 28 novembre prochain. Néanmoins, le Saint Père pourra toujours être la cible d’un provocateur. Même si, un seul coup de feu est tiré sans qu’il fût blessé, le retentissement sera énorme en Europe. Cela permettrait à la politique du président Bush de rallier autour de lui, une Europe encore hésitante, face à sa politique au Proche Orient et serait désastreux pour l’image européeenne de la Turquie. Le président Bush continue à être mécontent de la politique indépendante de l’establishment militaire turc qui avait eu pour conséquence, en particulier, le refus turc en 2003, d’ouvrir un front nord dans l’invasion de l’Irak, et la Turquie est fort inquiète des intentions américaines d’autonomisation du Kurdistan turc. Un attentat turc contre Benoît XVI serait l’équivalent d’un 9-11 proche-oriental, entre les mains du président américain.
Il est donc très important de clarifier le contenu de ce discours qui, même s’il avait été lu avec attention, en entier, par les musulmans, les politiques et les journalistes occidentaux, sa compréhension leur aurait échappé, du fait du vaste bagage de connaissances nécessaires pour en saisir l’essentiel.
De plus, le sujet du cours –car il ne s’agit pas de discours- que le professeur Ratzinger délivra à ses anciens collègues de l’Université de Ratisbonne (Regensburg), en Allemagne, le 12 septembre 2006, concernait exclusivement le dialogue avec les Grecs orthodoxes et aucunement les musulmans. Permettez-donc au Grec chrétien orthodoxe que je suis, et spécialiste du sujet, de présenter ici une explication de texte de ces cinq pages exceptionnelles d’un collègue allemand qui se trouve être aujourd’hui assis sur le trône pontifical, et qui n’ont aucun rapport avec les insultes de bas étage lancées par les caricatures danoises ou même par le roman Les versets sataniques de l’écrivain Salman Rushdie.
Pour la première fois depuis le XVe siècle et la Renaissance italienne, un pape s’adresse aux Grecs pour leur dire : nous, les chrétiens occidentaux avons pris le mauvais chemin, il y a cinq cents ans, et sommes responsables de la division de la chrétienté entre l’Europe occidentale et l’Europe orientale., parce que a) nous avons mal interprété la pensée grecque et b) nous avons deshéllénisé le christianisme, l’hellénisme étant partie intégrante de notre religion. Notre compréhension de la vérité s’est éloignée de la raison grecque, du orthos logos (orthologismos) et s’est transformée en rationalisme, qui est un substitut déprécié de l’orthologisme, une distortion du logos. Le résultat peut aujourd’hui être constaté dans la décadence de l’Occident. En conséquence, afin de revenir à l’unité de l’Europe chrétienne, le christianisme occidental devrait reconnaître son erreur et se reconnecter avec l’orthodoxie grecque chrétienne.
Jusqu’à présent, les papes avaient essayé de refaire cette unité au travers d’une diplomatie théologique, dénommée oecuménisme. Comme dans tout dialogue diplomatique, chaque partie aurait dû renoncer à une partie de ses positions premières. Néanmoins, les intégristes chrétiens de l’Orient comme de l’Occident refusaient de faire la moindre concession, sur la base que la vérité de Dieu ne se marchande pas sur une table de négociations. Le savoir supérieur du présent pape et savant lui permet donc de surmonter l’impasse, non pas en répétant des excuses sans fin, auprès des orthodoxes pour crimes commis dans le passé, non pas en faisant des concessions sur le dogme, mais simplement en affirmant que l’Occident est condamné à mort, parce que 500 ans auparavant, il sépara le christianisme de l’hellénisme.
Pour ce qui est des musulmans, nous devons reconnaître que la connaissance que Benoît XVI a de leur religion est moins profonde que sa connaissance de l’orthodoxie grecque. Voilà pourquoi, il s’oppose à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Peut-être aurait-il fallu que ce savant hors pair étudiât un peu plus à fond ce que fut vraiment l’Empire ottoman. En tant qu’ottomaniste moi-même, je suis arrivé à la conclusion, dans mes nombreuses études sur le sujet, que l’Empire ottoman ne fut jamais un véritable Etat musulman. La dynastie ottomane était d’origine alévie, une religion en soi, très éloignée de l’orthodoxie islamique et même du soufisme. Encore de nos jours, environ 25 millions de citoyens de la République de Turquie, c’est-à-dire un tiers de la population, sont d’origine alévie. Si l’on y ajoute les sécularistes libres penseurs qui sont soutenus par le pouvoir des militaires turcs, alors près de la moitié de la population de la Turquie ne devrait pas être considérée musulmane. De plus, ainsi que l’avait expliqué l’ancien président de la Turquie, Turgut Özal, dans son livre fameux La Turquie en Europe (que j’avais personnellement aidé à ce qu’il fût rédigé, en tant que collaborateur intime du président), les Etats actuels de la Turquie et de la Grèce qui tous deux faisaient partie de l’Empire ottoman, ont une civilisation commune, à savoir la civilisation grecque. En conséquence, il paraîtrait anormal que seule la moitié de cet ensemble -la Grèce- fît partie de l’Union européenne, tandis que l’autre moitié –la Turquie- en serait exclue. En ne comprenant pas le fondement culturel commun de cette relation entre la Grèce et la Turquie, en persistant à exclure la Turquie de l’Union européenne, le danger est que les islamistes s’empareront de la Turquie et l’inclueront dans le camp islamique, tout en élargissant la fracture dans les cercles religieux orthodoxes - dont le Patriarche oecuménique siège à Istanbul- entre factions rivales, depuis mille ans, des pro-Occidentaux et des pro-Turcs.
Le pape a eu comme une révélation, en lisant les 26 dialogues (dialexeis) du savant empereur byzantin Manuel II Palaiologos (1391-1425) sur la religion. L’Empire byzantin était le royaume du ciel sur la terre, le seul civilisé, continuateur de la tradition hellénique. Il était entouré des peuples extérieurs, dits «barbares», les Francs à l’Ouest, romains catholiques et les Arabes à l’Est, musulmans, qui le combattaient au moyen des croisades et du djihad. Tous les spécialistes de l’Empire byzantin, dont Alain Ducellier, nous disent que le rêve pacifiste byzantin provenait de la conviction profonde des habitants de cet empire chrétien oecuménique que la poursuite de la paix était une condition préalable à toute action. Ducellier écrit : «Pour les Byzantins, la guerre est la pire des choses, elle est foncièrement mauvaise et sans excuse...formule qui rappelle tant les idées de Thucydide... il faut donc bien admettre la persistance d’un idéal typique de la Grèce ancienne, encore conforté par le respect chrétien de la vie» (p.229-230, de Alain Ducellier, Le drame de Byzance, Hachette, 1997). Benoît XVI dans son cours remarque : «Ne pas agir selon la raison, ne pas agir avec le logos [en faveur de la non violence inconditionnelle], est contraire à la nature de Dieu, a dit Manuel II, partant de son image chrétienne de Dieu, à son interlocuteur persan. C’est à ce grand logos, à cette ampleur de la raison, que nous invitons nos interlocuteurs dans le dialogue des cultures».
L’Europe chrétienne, en pleine décadence, est menacée de disparition et seule le retour aux sources helléniques du christianisme pourra la sauver. Voilà la conviction profonde de ce grand pape qui si jamais, il était assassiné en Turquie, en novembre, par les islamistes, demeurera le plus grand pape de l’histoire, depuis le schisme de 1054.
notes Dimitri Kitsikis, Ph.D, Professeur émérite, Relations internationales et géopolitique, Université d’Ottawa, Membre de la Société royale du Canada.
http://www.voxnr.com/cc/tribune_libre/EEyFEluyplFklnuvXi.shtml | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Benoît XVI, les Loups Gris et l'islam Ven 10 Nov - 20:35 | |
| - Ferrier a écrit:
- Le danger provient sans doute de Turquie et plus précisément du groupe nationaliste turc païen des «Loups gris» (Bozkurt), qui est l’équivalent des groupes païens européens qui essayent de faire revivre les traditions préchrétiennes d’Europe (comme les religions grecque, celte et autres). Cette organisation d’extrême droite a pour symbole un loup gris hurlant à la lune, et nourrit, depuis longtemps, une antipathie prononcée pour le Vatican et particulièrement à l’encontre de Benoît XVI qui s’est prononcé clairement contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. C’est un membre de cette organisation, Mehmet Ali Agca, qui avait tiré sur le pape Jean-Paul II à Rome, en 1981.
"J'ai décidé de tuer Jean-Paul II, commandant suprême des croisés", Ali Agca. Peut-être a-t-il agi avant tout comme agent du KGB bulgare plutôt que loup gris. - Citation :
- En tant qu’ottomaniste moi-même, je suis arrivé à la conclusion, dans mes nombreuses études sur le sujet, que l’Empire ottoman ne fut jamais un véritable Etat musulman. La dynastie ottomane était d’origine alévie, une religion en soi, très éloignée de l’orthodoxie islamique et même du soufisme. Encore de nos jours, environ 25 millions de citoyens de la République de Turquie, c’est-à-dire un tiers de la population, sont d’origine alévie. Si l’on y ajoute les sécularistes libres penseurs qui sont soutenus par le pouvoir des militaires turcs, alors près de la moitié de la population de la Turquie ne devrait pas être considérée musulmane.
Aspect peu connu de l'histoire turque. - Citation :
- De plus, ainsi que l’avait expliqué l’ancien président de la Turquie, Turgut Özal, dans son livre fameux La Turquie en Europe (que j’avais personnellement aidé à ce qu’il fût rédigé, en tant que collaborateur intime du président), les Etats actuels de la Turquie et de la Grèce qui tous deux faisaient partie de l’Empire ottoman, ont une civilisation commune, à savoir la civilisation grecque. En conséquence, il paraîtrait anormal que seule la moitié de cet ensemble -la Grèce- fît partie de l’Union européenne, tandis que l’autre moitié –la Turquie- en serait exclue. En ne comprenant pas le fondement culturel commun de cette relation entre la Grèce et la Turquie, en persistant à exclure la Turquie de l’Union européenne, le danger est que les islamistes s’empareront de la Turquie et l’inclueront dans le camp islamique, tout en élargissant la fracture dans les cercles religieux orthodoxes - dont le Patriarche oecuménique siège à Istanbul- entre factions rivales, depuis mille ans, des pro-Occidentaux et des pro-Turcs.
Oui, c'est pour ça que les positions radicales qu'elles soient pro ou anti ne sont pas constructives.
Dernière édition par le Ven 10 Nov - 20:39, édité 1 fois |
| | | Ferrier Administrateur
Nombre de messages : 18530 Localisation : Europe-Nation
| Sujet: Re: Benoît XVI, les Loups Gris et l'islam Ven 10 Nov - 20:38 | |
| - Citation :
- Oui, c'est pour ça que les positions radicales qu'elles soient pro ou anti ne sont pas constructives.
J'ai expliqué pour quelles raisons il fallait dire non à la Turquie, mais si tu as bien lu mon article sur le sujet, tu remarqueras que j'ai adopté une position qui me semble honnête, quoique trop kémalisante. | |
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