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 Interview d'Yves Bataille (troisième partie)

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Spartiate
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Nombre de messages : 21

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MessageSujet: Interview d'Yves Bataille (troisième partie)   Interview d'Yves Bataille (troisième partie) EmptyMar 15 Nov - 0:12

5.Alija Izetbegovic a basé la fondation de l’Etat bosniaque sur la religion musulmane. Naguère catholiques, musulmans et orthodoxes pouvaient vivre ensemble. Comment peut-on juger le rôle d’Izetbegovic ? Ne pouvait-on pas continuer à vivre ensemble? Cela aurait évité beaucoup de morts et la fracture des Balkans qui favorise les Etats-Unis.

Telle que posée la question pourrait sous-entendre une culpabilité des Serbes dans l’affaire bosniaque. Or il n’en est rien. Comme les Serbes de Krajina, les Serbes de Bosnie ne sont en rien les séparatistes décrits par les médias occidentaux. Après les sécessions slovène et croate appuyées par l’Allemagne, l’Autriche et le Saint-Siège, la guerre en Bosnie a été provoquée par l’appui délibéré apporté aux musulmans par l’alliance des Etats-Unis et de l’Islamisme contre l’Europe. D’aucuns prétendent que cette thèse n’est plus d’actualité, qu’ici et là des musulmans tirent sur des Américains. Et c’est vrai qu’en Afghanistan et en Irak des musulmans résistent aux Américains mais il y en a aussi autant sinon plus qui pactisent avec eux. Dans les Balkans, Bosniaques et Albanais arborent le drapeau étoilé.

Dans le conflit yougoslave ce qu’il faut bien comprendre c’est que si des éléments séparatistes existaient comme partout c’est le soutien et la manipulation exercés de l’étranger qui ont transformé des revendications socio-économiques ou culturelles en conflits locaux et des conflits locaux en guerre régionale. Sans cet appui extérieur, une réaction rapide et maîtrisée aurait pu préserver l’unité de l’espace yougoslave et l’on aurait ainsi évité toutes ces grotesquescomédies de l’indépendance slovène, croate, bosniaque… Mais pour cela il fallait un pouvoir central fort qui n’ existait pas dans la Fédération post-titiste. Belgrade n’en était que la capitale titulaire. Dans le pouvoir rotatif attribué à tour de rôle à des représentants des diverses républiques, les Serbes jouaient un rôle mineur ne correspondant ni à leur nombre ni à leur aspiration. Enfin la Serbie était la seule république à être affublée de deux régions autonomes, la Vojvodine et le Kossovo. On a vu l’usage qui a été fait du Kossovo et les tentatives faites en Vojvodine. A l’étranger ceux qui ont fustigé la suppression de l’autonomie de ces deux régions par Slobodan Milosevic n’ont jamais demandé pourquoi les Serbes de Krajina n’avaient pas droit à une région autonome.

En l’absence de chef charismatique et de parti se substituant à l’Etat (ce qu’étaient le Maréchal Tito et la Ligue des Communistes) le fédéralisme outrancier qui prévalait a facilité l’éclatement du pays. Pour une nation de taille moyenne le maintien d’un Etat unitaire est une question vitale. La structure fédérale instaurée à la succession du général Franco aurait pu exposer l’Espagne au même type d’éclatement que la Yougoslavie si les maîtres du monde avaient pris la décision de la dépecer. L’Espagne doit le maintien de son unité à son allégeance à l’OTAN. Si l’Espagne avait fait de la résistance, on aurait pu voir se produire dans la péninsule ibérique un scénario identique à celui de la Yougoslavie. Il fut un temps, on s’en souvient, où les séparatistes basques de l’ETA n’étaient pas qualifiés de « terroristes » par les démocraties occidentales mais présentés comme des résistants à Franco.

Dans l’affaire yougoslave les Américains ont fait feu de tout bois, manipulant à leur guise les ethnies et les religions dans une fédération déstabilisée par la coupure subite des crédits à la Yougoslavie et les effets des chocs pétroliers. Les premiers contacts de la CIA avec les séparatistes albanais datent du début de 1990. Après l’implosion soviétique et la réunification allemande il fallait à tout prix déstabiliser la région pour occuper le terrain militairement. Le moment était opportun, la Russie était momentanément neutralisée et l’Europe inexistante. Il fut facile de se servir des « petits nationalismes » libérés de l’ordre communiste. D’abord celui des voisins hongrois, bulgares, albanais qui reluquaient des morceaux de l’espace yougoslave, ensuite celui des républiques internes qui devaient se voir érigées en « Etats de droit international » en violation de la Charte des Nations Unie et des accords d’Helsinki et pour la plus grande satisfaction des petits chefs locaux devenus de grands chefs « nationaux ». Izetbegovic fut l’un d’eux.

Tout d’un coup les lignes de démarcation administratives étaient transformées en frontières d’Etat. Tout d’un coup les citoyens qui vivaient dans l’une ou l’autre des république se retrouvaient du jour au lendemain étrangers dans leur propre pays.

Sur la Bosnie la guerre médiatique a tenu deux types de discours visant deux cibles différentes : dans les démocraties occidentales on faisait croire que les Bosniaques musulmans étaient menacés par « les milices fascistes de Slobodan Milosevic, d’Arkan et de Seselj », par les partisans de la Grande Serbie. Alors que ces dites milices étaient des groupes d’auto-défense et que les Serbes avaient en face d’eux de véritables armées privées bien équipées et assistées par qui l’on sait, en Occident on répandait que la démocratie et les droits de l’homme étaient en péril.

Mais dans le monde arabo-musulman d’Afrique et d’Orient on tenait un tout autre langage. On faisait croire, comme en Afghanistan hier, que l’Islam était attaqué par les communistes. En Afghanistan cela a créé dans les années 1980 les Gulbuddin Ekmatyar et les Osama Ben Laden. Alors que les régimes baa’thistes de Syrie et d’Irak et la Jamahiria Lybienne de Mu’ammar Kadhafi se tenaient à l’écart, la fixation anti-serbe et l’aide des Séoudiens, des émirs du Golfe, des islamistes turcs, des Pakistanais, des Malais, du Sultan de Bruneïet du roi du Maroc permettaient aux manipulateurs anglo-saxons de faire renaître et de doper l’Islam dans une région où cette religion était pratiquement éteinte et d’y créer un puissant réseau de solidarité islamique. C’était une bonne façon de pousser de nouveaux pions à l’Ouest du Grand Echiquier.

Aux mains de spécialistes en recevant les importantes retombées financières les agences de communication états-uniennes comme la Ruder Finn et les ONG « humanitaires » ont joué un rôle capital dans la manipulation globale. Ruder Finn est à l’origine de la sélection du vocabulaire et de l’inondation de la presse d’informations ad hoc. Les Serbes étaient les « nouveaux nazis », ils bâtissaient des « camps de concentration », commettaient des « viols » et des « crimes de guerre » et s’apprêtaient à commettre un « génocide ». Cette thématique n’était pas pour déplaire aux Allemands d’Helmut Kohl, de Hans-Dietrich Genscher puis de Klaus Kinkel qui pouvaient se croire déchargés d’un fardeau.

Pour comprendre la réaction des Serbes de Bosnie il faut songer aussi à deux réalités historique qui ont été plus ou moins occultées. D’abord une réalité récente, les Musulmans de Bosnie (avec un M majuscule) constituaient sous Tito une nationalité reconnue mais sans territoire qui permettait à ce dernier de s’assurer une position forte au sein du Mouvement des Non Alignés dominé par « l’esprit de Bandoung » qui a animé les révoltes du tiers monde et les mouvements d’émancipation. C’était avant le « revival islamique ». Mais en pleine période d’effervescence islamique, vouloir au début des années 1990 donner un territoire aux Musulmans, en l’occurrence celui de la Bosnie, était une provocation qui ne pouvait que déclencher la guerre puisque dans cette république de l’ancienne fédération yougoslave plus de la moitié de la population n’était pas musulmane. Les Serbes orthodoxes, les Croates catholiques et ceux qui se disaient tout simplement Yougoslave y étaient majoritaires et la majorité de cette majorité était serbe. En 1981 la population qualifiée de « musulmane » n’était évaluée qu’à 41% et elle ne se manifestait pas à l’époque comme particulièrement religieuse. Ce n’est qu’après la manipulation états-unienne que les mosquées et les écoles coraniques payées par l’Arabie Séoudite, les émirs du Golfe, le roi du Maroc et cetera, ont fleuri… Et là nous sommes dans l’étage supérieur de la manipulation.

En favorisant l’antagonisme entre l’Orthodoxie et l’Islam (comme on a renforcé la tendance au repli religieux des immigrés arabes en France et en Espagne) on créait un problème dans les Balkans et on tendait un piège à l’Europe dans son ventre mou en cherchant à provoquer le « choc des civilisations » théorisé par Samuel Huntington . C’était aussi une diversion utile qui allégeait un temps la pression sur Israël – regardez là-bas à Sarajevo « à deux heures d’avion de Paris » ce qui se passe, éructaient les Lévy et les Glucksmann, la presse enchaînait -, et pendant que l’on avait le regard attiré par Srebrenica on regardait moins vers Gaza. Tout cela a grandement facilité les plans états-uniens, la création de bases militaires et l’installation au pouvoir de fantoches dans des micro-Etats non viables. Pendant dix ans la Bosnie et le Kossovo ont fait la une des journaux et détourné l’attention de ce qui se passait en Palestine et en Irak et de ce qui s’y préparait.

Ensuite le deuxième volet de cette réalité historique en partie occultée remonte à plus loin dans le temps: si la réaction serbe aux prétentions « musulmanes » a été aussi vigoureuse, on la doit aussi au fait que les dirigeants de la sécession bosniaques autour d’Alija Izetbegovic (lié aux Frères Musulmans, une organisation naguère mise sur orbite par l’Intelligence Service, comme les Phalanges chrétiennes au Liban…) étaient tous issus des familles favorisées par l’occupant pour leur collaboration avec l’Empire ottoman. Avant leurReconquista tardive (elle date du début du XIX° siècle avec Kara George) les Serbes étaient ce que les Turcs appelaient la « Raïa», les paysans pauvres et méprisés. Dans les villes plastronnaient et s’enrichissaient les amis du Pacha. La « cosmopolite » occupation ottomane, qui nous est présentée par certains historiens comme un bienfait, a duré six siècles et seul des Espagnols sourcilleux - et on les comprend - sur certaines prétentions affichées à nouveau sur l’Andalousie, peuvent comprendre mieux que d’autres ce que cela signifie. Ils peuvent aussi comprendre mieux que d’autres le rôle de ces minorités argentées et cultivées, « sans patrie ni frontières », à travers le temps et l’espace, dans la promotion des invasions et l’occupation des territoires. Dans la région les Anglo-Saxons ont flatté ces nostalgies ottomanes comme ils ont essayé d’utiliser le panturquismeet le pantouranisme en Asie centrale. En mai 1992, en soutien d’Alija Izetbegovic à Sarajevo le premier ministre turcSuleïman Demirel rappelait qu’ « il existe un monde turc qui s’étend de l’Adriatique à la Muraille de Chine ». Ce n’est pas complètement faux, j’ai pu m’en rendre compte ces dernières années lors de mes voyages en Chine, on trouve en effet des musulmans d’origine plus ou moins turque à quelques kilomètres de Pékin. On y trouve aussi des bouddhistes en pleine réhabilitation.

Dans l’inconscient collectif du peuple serbe, les Musulmans bosniaques de la guerre étaient – restent - les héritiers de tous ces traîtres qui ont joué sur le temps long le jeu des empires occupants (des Osmanlis avant-hier aux Yankees aujourd’hui en passant par les Nazis hier). Cette mémoire la plus longue est la raison pour laquelle les Serbes ont été qualifiés d’ « archaïques » par les barbares de Brooklyn ignorant les racines du terme. Pendant la guerre en Bosnie les intellectuels cosmopolites des capitales occidentales fustigeaient le Mémorandum de l’Académie Serbe (SANU), le présentant comme le programme nationaliste « grand-serbe » de Milosevic, et même pour certains obsédés, comme un Mein Kampf serbe. Ils spéculaient sur le fait que pratiquement personne n’avait lu ce document qui n’était en réalité qu’une synthèse de l’état des lieux, en deux parties : la crise socio-économique et la question des Serbes du Kossovo. En revanche ces mêmes ardents supporters d’Izetbegovic passaient sous silence sa Déclaration Islamique, manifeste annonçant que dans la nouvelle Bosnie de ses rêves, il n’y aurait place que pour une seule religion, l’Islam.
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