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 Causes et manifestations de la christianisation

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Ferrier
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Ferrier


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MessageSujet: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptyDim 27 Aoû - 20:33

Citation :
La christianisation réelle de l’Europe : causes et manifestations.



A en croire certains historiens, la christianisation se serait faite sans problèmes, comme une mécanique bien huilée. « Très naturellement », les Européens auraient renoncé de leur propre chef à des traditions religieuses plurimillénaires, sous l’influence d’évangélistes dignes des plus grands magiciens. Certes, on nous concèdera que les campagnes occidentales ont résisté davantage à la christianisation, et d’une certaine manière c’est exact, puisque les régions les plus reculées et inaccessibles d’Europe avaient peu de chances de rencontrer des évangélistes ou des troupes ennemies. Mais même dans les cités, et contrairement à la légende chrétienne de l’évangélisation, le paganisme résiste pendant très longtemps, bien au-delà de la chronologie traditionnelle, et de même dans les pays celtiques, germaniques, baltes et slaves, il y a eu de nombreuses réactions païennes qui, à terme, ne pouvaient triompher, mais qui témoignent du fait que le christianisme s’est imposé davantage par la coercition que par la force de conviction.

    1. Caucase et christianité.


    Les premières terres européennes christianisées l’ont été au début du IVème siècle de notre ère, dans la région du Caucase, et sous l’impulsion de deux évangélistes, un homme et une femme, Grégoire et Nino, aboutissant à une décision politique des souverains des trois états caucasiens, à avoir l’Ibérie (ancien nom de la Géorgie), l’Arménie et l’Albanie caucasienne ou Aghbanie (ancien nom de l’Azerbaidjan). Quels sont les raisons de cette conversion ? Il semblerait que face à un empire perse dont la religion zoroastrienne avait fortement influencé les religions indigènes des états du Caucase, et face à un empire romain qui était encore païen et qui s’opposait à l’ascension du christianisme, les souverains du Caucase ont voulu se dissocier et des uns et des autres, en même temps qu’ils auraient subi l’influence des communautés chrétiennes de Cappadoce, fort nombreuses dit-on. Des raisons commerciales ont ainsi pu s’ajouter à des raisons géostratégiques. Ajoutons enfin que le monothéisme favorise la monarchie, et inversement, et qu’il était intéressant pour des souverains dont la piété païenne pouvait être sujet à caution, de renforcer leur pouvoir par la mise en avant de cette nouvelle religion. Dès le IIème siècle, dans l’empire romain, les évêques chrétiens avaient d’ailleurs tenté de convaincre les empereurs de soutenir le christianisme et avaient cherché à convertir la famille impériale. C’est ainsi que des familiers de Domitien furent condamnés à mort comme « judaïsants » c'est-à-dire peut-être chrétiens, et au IVème siècle, l’épouse et la fille de l’empereur Dioclétien auraient, elles aussi été chrétiennes, comme la mère de Constantin par exemple.

    Entre 297 et 301 PC, le roi Tiridate ou Trdat III (ou IV selon les versions), qui aurait auparavant persécuté les chrétiens de son royaume, se convertit progressivement au christianisme sous l’influence de Grégoire l’ « Illuminateur », l’évangéliste du Caucase, après que ce dernier ait accompli des prodiges. Ainsi, Tiridate fit-il détruire plusieurs temples, qu’ils soient dédiés à des divinités arméniennes ou au culte zoroastrien. L’évènement est en lui-même assez mystérieux et les documents rares et à analyser avec prudence. Le temple païen était appelé mihyan et on peut se demander si ce terme n’est pas lié au dieu Mehr, c'est-à-dire à la version arménienne de Mithra. Ainsi, le choix du christianisme aurait été une forme de prise d’indépendance face aux Iraniens qui influençaient le royaume au même titre que les Romains. Il est également fort surprenant de constater que d’autres souverains vont se convertir dans la même période, à l’instar du roi de Géorgie Mirian III et de son épouse Nana qui choisissent en 337 PC la religion chrétienne. Là encore, dans son nom propre, dérivé de Mirsa, version géorgienne de Mithra, le souverain témoigne de l’influence iranienne, et pour les mêmes raisons, le choix du roi ibère a dû se servir du christianisme comme d’une marque d’indépendance. Enfin, le roi d’Aghbanie, royaume le plus proche de l’empire perse, Urnayr, en 314 PC, sous l’influence de son puissant voisin arménien, se convertit à son tour.

    L’empire perse ne se trompera pas pour interpréter ces conversions, les mages seront envoyés, avec des troupes pour les protéger, afin de ramener les pays caucasiens dans le giron religieux des Sassanides. Entre 399 et 420 PC, le shah Yazdagard Ier, à l’origine plutôt favorable au christianisme, lance des offensives contre les chrétiens du Caucase comme contre les chrétiens de l’empire, et cette politique sera continuée en 421 PC par son successeur Bahram Vet de 438 à 459 PC par Yazdagard II, souverain à la fois hostile aux chrétiens et aux juifs et défenseur acharné de l’orthodoxie zoroastrienne.

    Notons enfin que la christianisation du Caucase avança plus lentement pour le reste du territoire. Le Lazistan ou Colchide ne se convertira très progressivement qu’à partir de la fin du Vème siècle et au VIème siècle, la christianisation échouera finalement en pays vaïnakh (Tchétchènes et Ingouches), le paganisme y demeurant jusqu’à la conversion à l’islam au XVIIIème siècle, bien qu’un temple païen fut construit en Ingouchie, en l’honneur du dieu de l’orage Seli, en 1958.


    2. Rome entre paganisme et christianisme.

    Si l’Arménie est le premier état chrétien de l’histoire, l’empire romain voisin ne va pas tarder à la rejoindre, selon un processus assez complexe mais qui témoigne d’une lassitude des empereurs à « persécuter » la nouvelle religion en plus d’un changement psychologique provisoire à l’égard des pratiques sanglantes, comme les sacrifices religieux ou les mises à mort. Le témoignage le plus significatif est celui de Constantin qui a été choqué et ému par le sort des chrétiens à Constantinople et on ne peut nier l’importance de ce sentiment lorsque nous allons nous intéresser à l’évolution religieuse de l’empereur.

    Deux phases de lutte impériale contre le christianisme ont eu lieu dans l’empire romain, au milieu du IIIème siècle d’abord puis au début du IVème siècle ensuite. Contrairement à la légende chrétienne, les fameuses persécutions, qui étaient essentiellement motivés par des raisons politiques, furent sporadiques et le résultat de périodes troublées. La première grande période est celle qui commence avec les premières défaites romaines face aux barbares. C’est l’empereur Dèce, qui mourra d’ailleurs vaincu par les Goths, qui le premier prend la décision d’une persécution générale des chrétiens de l’empire, chrétiens qui seront débusqués par l’obligation faite à tous les citoyens de l’empire d’honorer par un rite païen l’empereur. A la mort de Dèce, son successeur Valérien continuera cette politique jusqu’à ce que lui aussi connaisse un sort tragique, capturé puis tué par les Perses. Son fils et successeur Gallien ne persécutera pas les chrétiens et cela sera le cas pendant presque quarante ans. La seconde grande période est celle de Dioclétien qui dès 303 PC promulgue plusieurs lois d’interdiction du christianisme dans l’empire, ces lois étant appliquées plus ou moins bien selon les empereurs subalternes et les régions.

    Parmi les subalternes puis les successeurs de Dioclétien, certains choisissent la rigueur à l’égard des chrétiens, comme l’empereur Galère en Orient, et son adjoint Maximin Daia, ou la douceur, comme l’empereur Constance Chlore, père de Constantin, mais dans des provinces où les chrétiens sont très minoritaires. En 305 PC, Dioclétien abandonne le pouvoir ainsi que son co-empereur Maximien, ce dans le cadre de sa réforme tétrarchique . Constance Chlore et Galère deviennent les nouveaux Augustes. Cependant dès 306 PC, le premier meurt et la question de sa succession est alors ouverte. Normalement, c’est le césar Sévère qui doit le remplacer et devenir Auguste, cependant deux prétendants au trône se font connaître et revendiquent le pouvoir en Occident. Il s’agit de Maxence, fils de Maximien, et de Constantin, fils de Constance. L’un comme l’autre vont se montrer tolérants à l’égard du christianisme, alors que les empereurs d’Orient continuent de persécuter les chrétiens.

    A Rome, Maxence mène une politique de renaissance païenne, fait reconstruire de nombreux temples et honore tout particulièrement le dieu Mars ; cependant c’est également un empereur tolérant, qui respecte le culte chrétien. De son côté, Constantin est également favorablement orienté par un entourage chrétien à la tolérance. Et même Galère, pourtant l’un des plus farouches opposants à la nouvelle religion, avant de mourir, en 310 PC, demande subitement la tolérance pour les chrétiens. Face à un empereur païen qui cherchait à se mettre les dieux traditionnels de Rome dans la poche, à savoir Maxence, Constantin prend la décision de solliciter des divinités nouvelles, et fait ainsi appel à Sol Invictus et au Christ, perçus l’un et l’autre comme deux aspects du dieu solaire. Par sa victoire conquise sur les armées de Maxence en 312, à l’issue de la bataille du Pont Milvius, à proximité de Rome, Constantin fait le premier pas vers la reconnaissance officielle de la religion chrétienne dans l’empire. En Orient, Maximin Daia, le dernier persécuteur du christianisme, sera vaincu quant à lui en 313 PC par Licinius, pourtant lui-aussi païen. Ensemble, Licinius et Constantin, cette même année, édictent un édit de tolérance pour les chrétiens qui aboutit à la restitution des biens confisqués et même à la reconnaissance du christianisme comme deuxième religion de l’empire. Il faut rappeler qu’en 305 PC, les chrétiens ne représentaient que 5% de la population de l’empire.


Dernière édition par Ferrier le Dim 18 Jan - 1:33, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptyDim 27 Aoû - 23:40

Citation :
    Bien que Constantin ait été originellement païen, et bien qu’il n’ait renoncé à tout paganisme que tardivement, à partir de 325 PC et sa victoire sur Licinius, faisant de lui le seul empereur, Constantin se montre de plus en plus chrétien. S’il ne persécute pas les païens, s’il conserve sa fonction de souverain pontife de la religion romaine, il favorise ouvertement le christianisme et ses fils sont éduqués dans cette religion, à l’exception de son premier né, Crispus. Ce dernier a par la suite été exécuté par son père, sous l’accusation mensongère d’inceste avec sa belle-mère, la seconde épouse de Constantin, qui avait été elle-même exécutée quelques temps auparavant, elle aussi sous de fausses accusations. Celui qui, succédant à son père, aurait pu ramener le paganisme sur le trône, meurt victime d’une conjuration dont le « parti chrétien » n’est peut-être pas innocent. Constantin fait également exécuter quelques philosophes païens de son entourage personnel, comme le néo-platonicien Sopatrus, accusé de magie.

    A partir de la mort de Constantin en 337 PC, les empereurs sont désormais des chrétiens qui très vite vont chercher à persécuter les païens, à l’instar de Constance II qui promulgue des édits d’interdiction du paganisme, édits qui dans un empire très majoritairement païen ne sont pas appliqués. Une réaction païenne immédiate s’en suit, avec à sa tête le cousin de l’empereur, Julien (361-363).

    Julien, dont la famille a été exterminée par son oncle, a été converti de force dans sa jeunesse, mais son éducation classique et sa fréquentation des milieux païens d’Athènes et de Constantinople l’ont amené à retrouver la religion de ses parents. Redevenu païen, il soutient davantage le courant philosophique du paganisme, avec sa religiosité solaire, que le paganisme plus traditionnel des milieux conservateurs de Rome, majoritaires au Sénat. Quoi qu’il en soit, Julien favorise à nouveau le paganisme au détriment du christianisme qu’il ne persécute cependant pas, bien qu’il interdise en 363 PC aux enseignants chrétiens d’enseigner les textes païens dans les universités. Décidé à vaincre l’ennemi perse, Julien entreprend par la suite une expédition militaire au cours de laquelle il sera tué d’un javelot dont tout laisse à penser qu’il n’a pas été envoyé par un ennemi mais par un soldat chrétien de sa propre armée. La mort du prince païen ramène sur le trône un chrétien, Jovien, et désormais, du moins dans la partie orientale de l’empire, il n’y aura plus d’empereur païen. En 391 et 392 PC, l’empereur Théodose interdit le paganisme dans tout l’empire romain et condamne à mort ceux qui seraient pris en train de pratiquer leur religion.

    Cependant, il ne faudrait pas s’imaginer, comme on l’a souvent cru, que Julien ait été la dernière chance des païens de l’empire romain. En 365 PC, son neveu Procope tente de s’emparer de l’empire et bénéficie semble-t’il du soutien du « parti païen », soutien insuffisant puisqu’il sera vaincu puis tué. Mais la tentative la plus sérieuse de restauration du paganisme sur le trône impérial fut mise en œuvre par les païens de Rome, de 392 à 394 PC, sous la direction de l’empereur Eugène, du franc Arbogast et d’un sénateur romain influent, Flavius Nicomaque. En 394, à la bataille de la Rivière Froide, les troupes d’Eugène, placés sous le patronage de Jupiter et d’Hercule, sont vaincues par les troupes bigarrées de Théodose, et ce dernier porte ainsi un coup très dur au paganisme.

    En 410 PC, la ville de Rome, dans laquelle les païens étaient encore majoritaires et influents, est finalement victime d’un siège par le germain chrétien Alaric. C’est une romaine chrétienne, Faltonia Proba, et ses esclaves, qui nuitamment ouvrent les portes de la cité aux germains, prétendûment par le souci d’éviter la famine. Les païens, notamment sénateurs, sont dénoncés par les chrétiens de Rome aux soldats d’Alaric, ces derniers les massacrant ou les volant. S’ils pillent les temples, ils épargnent les églises. Ainsi, le christianisme a-t’il, même si ce n’est que d’un point de vue symbolique, trahi Rome. Les païens survivants dénonceront d’ailleurs le christianisme comme principal responsable de la chute de la cité éternelle, ce que tentera de nier Augustin d’Hippone dans sa « Cité de Dieu ».

    Mais même après ce désastre, le paganisme résiste à la christianisation, et il faut repousser celle-ci dans le temps. Jusqu’à la fin du VIème siècle, les prêtres étrusques (haruspices) défendront la vieille religion avec un certain succès auprès des populations rurales de l’Italie du Nord. Parallèlement, le paganisme continuera de séduire une partie des élites de Rome. De 467 à 472 PC, l’empire romain d’Occident est dirigé par Anthemius, descendant de Julien et païen plus ou moins avoué. Par la suite, de 475 à 476 PC, c’est un jeune empereur, Romulus Augustus, qui dans son nom réunit celui du fils de Mars et fondateur de Rome d’une part, et celui du premier empereur romain d’autre part, qui dirige l’empire d’Occident. Compte tenu de son nom, il est tout à fait vraisemblable qu’il ait été païen, ce qui serait une façon de fermer la boucle, car il fut chassé du pouvoir par le germain Odoacre et fut de fait le dernier empereur de Rome. Quant aux provinces les plus occidentales de l’empire, comme l’Espagne, la Gaule et la Bretagne, leur christianisation fut extrêmement longue et l’existence de capitulaires carolingiens interdisant le paganisme à la fin du VIIIème siècle en atteste.

    Enfin, le paganisme basque quant à lui survivra à la christianisation jusqu’au moins à la fin Xème siècle et celle-ci sera très longue et ne sera réellement accomplie que plusieurs siècles plus tard, sans pour autant effacer de nombreuses traditions basques préchrétiennes, comme l’usage du symbole du lauburu, une croix représentant le dieu païen du ciel Urtzi.

    Dans la partie orientale de l’empire, on aurait pu penser que le christianisme, plus anciennement implanté, ait réussi à convertir massivement les populations. Il n’en fut rien. En 410, les Athéniens associeront à Athéna et à Achille la protection dont ils jouirent face au germain Alaric qui menaçait la cité. Ainsi l’isaurien Illus (le peuple isaurien vivait au sud de l’Anatolie) et son ami le poète païen Pamprepios tenteront en 488 PC de s’emparer du pouvoir, soutenu par le parti païen, pouvoir détenu par l’empereur Zénon qui finalement s’imposera et fera tuer ses adversaires. Par la suite, l’empereur Justinien, connu pour son intolérance religieuse, fera fermer l’école philosophique païenne d’Athènes, celle héritière de Platon, en 529 PC. Les philosophes s’exileront alors en Perse sassanide, le shah Khosro Ier obtenant leur réintégration en 532. Le néo-platonicien Damascius finira ainsi ses jours sur sa terre, mais Simplicius en revanche fondera une école païenne à Harrân/Carrhae en Mésopotamie, école qui sera fermée au XIème siècle seulement par les autorités musulmanes. En 562 puis en 580 PC, les autorités de Constantinole persécuteront les derniers païens de la capitale, et lanceront des croisades pour évangéliser de force les païens d’Anatolie, encore fort nombreux. Le temple d’Isis à Philae sera fermé en 537 PC, celui de Baal à Baalbek en 580, enfin le sanctuaire d’Ammon-Rê à Siwah, où Alexandre le Grand était jadis allé, sera fermé vers 650 PC, au moment de la conquête musulmane.

    Ainsi la christianisation de la partie orientale de l’empire se met elle essentiellement en place par la coercition. C’est ainsi que la philosophe païenne d’Egypte Hypatie sera massacrée par la foule chrétienne en 415 PC, victime du fanatisme des fidèles de la nouvelle religion. Aux persécutions des chrétiens vont succéder les persécutions des païens, à grande échelle et avec les grands moyens. Pourtant, malgré tout, le paganisme va résister. Ainsi, en Laconie, la province grecque autour du site de Sparte, connu pour son traditionnalisme, le paganisme va résister jusqu’au milieu du IXème siècle de notre ère, soit plus de six cents ans après la conversion de Constantin.


    3. Christianisme, celtitude et germanité.


    La christianisation des pays celtiques est également présentée de manière angélique, comme si le druidisme avait été incapable de s’opposer à la progression rapide du christianisme. En effet, selon la version officielle, l’évangéliste Patrick aurait réussi en quelques années à convertir massivement l’Irlande. A cette vision idillyque, il faut opposer les faits. Ainsi, le roi de Tara, la capitale, Diarmaid Mac Cearbhaill, qui règna de 545 à 561 PC, soit un siècle après l’évangélisation de Patrick, mena une violente réaction païenne, qui finalement avorta en raison de sa mort, lors de l’incendie de Tara par des fanatiques chrétiens. En 590 PC seulement, un synode à Drumceat prend la décision de restreindre les activités des druides, ce qui laisse penser que ceux-ci étaient encore très puissants à la fin du VIème siècle. En 637 PC, à l’issue de la bataille de Moyrath (ou Mag Roth), les druides verront leur institution abolie, certainement parce qu’appartenant au camp d’un souverain païen vaincu à ce moment là. En 927 PC, cinq cents ans après Patrick, il existait encore un séminaire druidique païen à Mur Ollavan, la « cité des lettrés », et en 980 meurt le souverain de Tara, Domnail Ua Neill, qui était le dernier roi à avoir eu des druides à sa cour. On constate bien que la christianisation a mis beaucoup plus de temps que ne l’ont affirmé les auteurs chrétiens.

    Chez les Pictes, le premier souverain qui aurait été chrétien est Bridei Mac Maelchon, mort en 586 PC, qui se serait converti sous l’influence du chrétien Colomban. Cependant, il semblerait bien qu’en réalité il soit demeuré païen et que la christianisation de l’Ecosse ait pris davantage de temps. En atteste notamment l’onomastique des souverains, qui témoignent d’une résistance païenne. Ainsi, aux alentours de 695 PC, le roi des Pictes porte le nom de Taran, nom du dieu de l’orage que l’on connaît en Gaule sous celui de Taranis. Au milieu du VIIIème siècle, le souverain portait le nom du dieu Oengus, dieu de l’amour analogue à l’Erôs grec. Adam de Brême parle même d’un souverain écossais païen du Xème siècle de notre ère, sans que nous ayions plus de précision.

    De la même façon, la christianisation des pays germaniques s’est faite de manière beaucoup plus longue qu’on ne l’a dit. Certes, Charlemagne parvient à convertir de gré ou plutôt de force, avec de nombreux massacres, à convertir au christianisme les Saxons allemands demeurés païens, malgré cependant une révolte païenne ultérieure en 840 PC, et de la même façon vers le VIIème siècle, le christianisme s’impose aux Anglo-saxons avec la conversion de leurs souverains, le dernier roi païen étant Penda de Mercie, mort en 655 PC.

    Ainsi le roi danois Harald Blåtand, « à la dent bleue », se convertira au christianisme en 960 PC seulement, et selon Adam de Brême, son fils et successeur, Sweyn Ier Forkbeard, serait demeuré païen, sans pour autant qu’il ait persécuté les chrétiens, même si Adam le représente comme un homme sombre et cruel. L’information est cependant à prendre avec prudence.

    En Norvège, c’est vers l’an 1000 que deux souverains chrétiens vont imposer la nouvelle religion à leur peuple. C’est d’abord Olaf Trygvasson qui va tenter et partiellement réussir à christianiser le pays, par une politique extrêmement coercitive. C’est sous sa puissante influente que déjà en 999 PC, l’Islande et les Iles Féroé vont se christianiser, même si en Islande une certaine tolérance à l’égard de ceux demeurés païens se maintiendra pendant quelques décennies. Sa politique sera suivie par Olaf II Haraldsson et sera menée à terme. On aurait pu croire que la Suède connaisse le même processus, mais celle-ci était sans doute moins ouverte aux relations internationales, moins dépendante aussi d’un commerce occidental qui était fermé aux non-chrétiens. Certes, la Suède du Sud, le Göthaland, va progressivement se christianiser avec la conversion en 1008 de son souverain Olof Skötkonung. Mais la Suède du Nord-Est, autour du lieu sacré d’Uppsala et de son temple dédié à Odin, Thor et Freyr, va résister plus longtemps. En effet, c’est en 1084 que le roi Ing de Suède cherche à imposer le christianisme dans cette partie de la Suède, et refuse ainsi devant la Thing d’Uppsala de pratiquer un rite païen. Les païens vont alors le désavouer et élire un autre souverain, païen cette fois, en la personne de Sven, dit Blot-Sven, « le sacrificateur », puisque lui va continuer d’honorer les dieux traditionnels et selon le rite approprié. En 1087 PC, il sera victime, lui et son entourage, d’une opération criminelle menée par des nervis chrétiens au service d’Ing, et sera ainsi assassiné. Son fils, Erik Årsäll, lui succédera, même s’il régnera par la suite plus au nord, de 1095 à 1098 PC, puisque le temple d’Uppsala sera incendié par Ing en 1087 à la mort de Sven.

    Les Suédois chrétiens par la suite, au XIIème siècle, organiseront des croisades d’évangélisation au détriment des Finnois païens. En 1156 PC, le chef finlandais Lalli opposera une vive résistance au christianisme, mais en 1165 PC, à la suite d’expéditions meurtrières, les Suédois parviendront à convertir de force les Finlandais, qui cependant se révolteront à plusieurs reprises et notamment de 1238 à 1248 PC, dix années de résistance païenne qui se solderont par l’échec.


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MessageSujet: Re: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptyDim 27 Aoû - 23:41

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    4. Le monde slave, entre catholicisme et orthodoxie.


    Le cas de la christianisation du monde slave et balte, et accessoirement de la Hongrie, est particulier puisque l’évangélisation n’est pas partie d’un seul foyer mais de deux et que s’est exprimée sur ce terrain l’opposition entre le christianisme occidental, d’esprit carolingien, d’une part, et le christianisme oriental, byzantin, d’autre part.

    La christianisation des Serbes commencera au VIIème siècle mais elle durera au moins deux siècles de plus avant d’être menée à son terme, de même que la Croatie restera majoritairement païenne jusqu’au début du Xème siècle. En Bulgarie en revanche, le khan Boris choisira aux alentours de 860 PC la religion chrétienne orthodoxe, puisque son royaume est à proximité de Constantinople. Cependant, son fils Vladimir mènera une violente réaction païenne de 889 à 893 PC, réaction qui comme plus généralement sera écrasée dans le sang par le retour du roi Boris, qui était devenu moine entre temps.

    En revanche, c’est le catholicisme que vont adopter les rois de Bohême, de Moravie et de Pologne. En 965 PC en effet, las des agressions permanentes des Allemands chrétiens, légitimés par une volonté de croisade et d’évangélisation, le roi Mieszko Ier choisit de se convertir, lui et sa famille. Cependant, en 1037 PC, une réaction païenne éclatera, notamment chez les Poméraniens, et qui nécessitera une intervention des Tchèques devenus chrétiens pour la mâter. La Moravie se convertit dès 875 PC avec son souverain Svatopluk, mais il faudra attendre un siècle exactement pour que Boleslaw de Bohême fasse la même chose, en 975.

    La Russie va elle aussi choisir le camp du christianisme, mais hésitera entre catholicisme et orthodoxie. Certes, la grand-mère du tsar Vladimir, Olga, aurait déjà été chrétienne ; elle se serait convertie à l’issue d’un voyage à Constantinople. Son fils et roi Sviatoslav, lui, était un défenseur acharné du paganisme et n’entendait pas renoncer à ses dieux traditionnels. Vladimir, son fils et petit-fils d’Olga, va commencer par suivre la voie paternelle et construire des temples païens à Kiev en l’honneur des grands dieux slaves, et de son dieu tutélaire notamment, Perun, ce en 980 PC. A l’issue d’un processus complexe, où les raisons politiques primaient sur tout le reste, la renaissance païenne mise en œuvre par Vladimir ne semble pas porter ses fruits. Ainsi en 988 PC, Vladimir choisit de renoncer au paganisme et de se convertir à une religion établie, la légende lui prêtant le fait d’avoir dû choisir entre le catholicisme, l’orthodoxie, l’islam et le judaïsme. Pour des raisons géopolitiques et familiales, Vladimir se convertit donc, fait détruire les temples de Kiev qu’il avait fait construire huit ans auparavant, fait assassiner des prêtres païens, des volkhvy ou « druides » slaves, et balancer la statue de Perun dans une rivière, en un lieu qui portera finalement son nom. A Novgorod, le parti païen résiste davantage, et ne renoncera à sa foi qu’au début du XIème siècle, sous l’influence du tsar Iaroslav. Malgré tout, les prêtres païens vont organiser la résistance, et c’est ainsi qu’en 1071 PC, les volkhvy organisent une révolte païenne massive dans les villes de Souzdal et de Novgorod notamment, et de telles révoltes auront encore lieu jusqu’au XIIIème siècle, malgré les persécutions.

    En Hongrie, la christianisation aura lieu elle aussi aux alentours de l’an 1000. En 985 PC, le roi Geza et son fils Istvan se convertissent à la religion chrétienne, son fils portant ensuite le nom de Stéphane Ier lorsqu’il devient roi en 997. Son oncle demeuré païen, Koppany, organise alors une révolte des aristocrates païens, Stéphane mettant trois ans pour le réduire à néant. En 1046 PC, avec à sa tête un autre aristocrate, Vatha, une autre révolte se met en place qui, elle aussi, sera brisée par l’action du nouveau souverain, Andras, qui l’avait soutenu à l’origine puis le fit éliminer lorsqu’il devenait encombrant.

    Les pays baltes vont résister davantage ; ils formeront l’un des derniers bastions du paganisme indo-européen en Europe. Certes, dès 1220 environ, des croisades anti-païennes vont rapidement faire passer l’Estonie et la Lettonie dans le camp de la chrétienté, au prix de nombreux massacres et d’une colonisation de peuplement partielle par des populations germaniques. En revanche, la Lituanie païenne, qui créera un énorme empire en plein Moyen-Age européen malgré ou grâce à sa religion polythéiste, ne l’entend pas ainsi. Certes, le roi Mindaugas se convertir en 1261 PC, afin de préserver son royaume des attaques des chevaliers teutoniques et autres croisés, mais constant que ces derniers continuaient leurs attaques, il a apostasié la même année et entrepris une politique de réaction païenne. Ses successeurs oscilleront entre un paganisme affirmé et un christianisme de façade, jusqu’à ce qu’en 1316 PC le roi Gediminas se convertisse, mais sans imposer la même chose à son peuple. C’est avec l’avènement du roi Jogaila (Jagellon) que le changement va intervenir, car ce dernier entend s’associer à la Pologne catholique, le prix à payer étant le renoncement aux dieux. En 1386 PC, Jogaila se convertit puis unit le royaume de Pologne et le duché de Lituanie en 1410. De la sorte, le dernier pays euro-païen entrera dans l’ère de la « modernité », même si le paganisme y survécut jusqu’à la fin du XVIIIème siècle.


Ainsi, la christianisation de l’Europe mit-elle un temps beaucoup plus long que les auteurs chrétiens ont voulu nous le faire croire, ce qui est au fond assez logique car on n’abandonne pas une religion millénaire sans se battre. La conversion du peuple n’était pas nécessaire, en une période où le souverain était le lien entre les divinités et la population. A chaque fois, ce fut la trahison d’un souverain qui fit changer la donne. Celui-ci le fit pour des raisons variées mais généralement pour des raisons politiques, économiques et culturelles. Les clercs étaient les dépositaires privilégiés de la culture antique et maniaient l’écriture latine, qui remplaça les runes ou les oghams des pays celtes, germaniques, slaves, hongrois et baltes. Le roi passé dans le « bon » camp, celui-ci s’assurait de la relative docilité de son peuple, et de sa conversion, par les moyens de l’époque, à savoir la corruption des élites ou la répression des païens tenaces. Parfois les pays chrétiens organisaient d’eux-mêmes la christianisation, en massacrant tout simplement tous les récaclitrants. Aucune des réactions païennes ne parvint à enrayer le processus car la christianisation de l’empire romain fut sans doute l’élément décisif. Ainsi c’est dans les échecs de Maxence face à Constantin, de Julien, puis d’Eugène face à Théodose, que la religiosité de l’Europe se joua, entre le paganisme ancestral et la nouvelle religion orientale. Clovis et tous les souverains « barbares » ne firent qu’imiter Constantin, pour des raisons fort peu religieuses d’ailleurs.

La christianisation ne fut en fait que de façade, un vernis que les autorités recouvrirent sur le monde euro-païen. Les fêtes païennes furent christianisées, à l’instar de Noël ou de Pâques placées à ces dates. Les dieux furent remplacés par le Dieu chrétien ou par des saints, les déesses par la vierge Marie ou par des saintes. Souvent saints et saintes étaient des personnages purement fictifs, comme Sainte Demetra à Eleusis, derrière qui se cache la déesse Démeter, ou Sainte Minerva et Sainte Venera à Rome, où l’on reconnaît les déesses Minerve et Venus. Le dieu suprême des païens put également servir à désigner le dieu chrétien. Ainsi, en Lituanie et en Lettonie, Dievas et Dievs désignent aussi bien le « Zeus » des Baltes païens que Dieu. De même, le nom du dieu du ciel tchétchène, Diala, servira à désigner aussi bien le dieu chrétien qu’Allah.


Thomas Ferrier
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MessageSujet: Re: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptySam 4 Déc - 20:11

«Le christianisme a donné un poison à Éros, Le petit Dieu n'en n'est pas mort, il est devenu vicieux !»

«Prêcher la chasteté c'est exciter publiquement à violer les lois de la nature» Nietzsche.
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MessageSujet: Re: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptyDim 5 Déc - 22:22

«Les saints, écrivait Georges Orwell en 1949, devraient toujours être jugés coupables, jusqu'a ce qu'on ait prouvé leur innonence»
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MessageSujet: Re: Causes et manifestations de la christianisation   Causes et manifestations de la christianisation EmptyDim 23 Fév - 10:28

Citation :
There were Druids' Hills at Uisneath, Westmeath, and Clogher of Tyrone. The Draoithe were wise men from the East. Dubhtach Mac Ui' Lugair, Archdruid of King Mac Niall, became a Christian convert. The Battle of Moyrath, asserted by monkish writers to have taken place in 637, decided the fate of the Druids. And yet, the Four Masters relate that as early as 927 B.C., there existed Mur Ollavan, the City of the Learned, or Druidic seminary.

http://www.sacred-texts.com/pag/idr/idr05.htm
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